Littérature contemporaine

Tortues à l’infini (John Greene)

Marc Bordier par Marc Bordier /

Tortues-infini-John-Greene

   Tortues à l’infini, un phénomène chez les lecteurs adolescents…

Je n’ai pas réussi à finir Tortues à l’infini, le nouveau roman de John Green : il m’est tout simplement tombé des mains. Pourtant, l’auteur de Nos étoiles contraires a su conquérir son public de nerdfighters grâce à une activité intense sur les réseaux sociaux, et ses romans ont la réputation d’être des page turners capables de captiver un lectorat de jeunes adolescents à l’attention pourtant très sollicitée par Facebook et Snapchat. Mais pour un lecteur à l’esprit simplement curieux et vierge de toute influence, en quoi le roman de John Green est-il digne d’intérêt ?

Tortues à l’infini raconte l’histoire d’Aza, une jeune fille de 16 ans atteinte de troubles obsessionnels compulsifs. Avec l’aide de son amie Daisy, elle enquête sur la disparition d’un milliardaire en fuite. Ecrit du point de vue de son personnage principal, le roman met en scène l’univers mental intime de l’adolescente, marqué par une spirale sans fin de pensées intrusives qui viennent gâcher chaque instant de sa vie.  Obsédée par la présence de bactéries clostridium difficile dans son corps, Aza redoute le contact avec le monde extérieur et guette avec anxiété les moindres bruits dans ses intestins.

… mais un succès qui doit davantage au pouvoir d’influence de l’auteur qu’à ses qualités littéraires

Ai-je été rebuté par le côté pas très glamour de ce thème ? Ou bien par la vacuité et la platitude des dialogues entre adolescents qui parcourent le récit, comme cet échange de textos entre Aza et son amoureux :

Moi : “Alors comme ça, tu aimes la courbe de mon mollet ? Je n’y avais jamais fait attention.

Lui : Elle est jolie.

Moi : C’est tout ?

Lui : J’aime ton cul. Je l’aime beaucoup. J’abuse ?

Moi : Non.

Lui : J’ai envie de lancer un blog de fan de ton cul.

Moi : OK, ça c’est un peu bizarre.

Lui : J’écrirai une fanfiction qui racontera la rencontre amoureuse entre ton derrière de folie et tes yeux magnifiques.”

Pris de désespoir, j’ai fini par abandonner au bout de deux cents pages. Peut-être suis-je passé à côté de quelque chose. En y réfléchissant, je me dis que l’intérêt de ce livre ne réside probablement pas dans ses qualités littéraires, mais plutôt dans l’influence fascinante que John Green a réussi à construire au fil des années grâce à Youtube et aux réseaux sociaux (lire à ce propos cet excellent article du Monde). Pour une fois, ce n’est pas le livre lui-même qui est digne d’intérêt, mais plutôt la stratégie promotionnelle qui l’entoure.