Littérature contemporaine

Laurent Gaudé – Ouragan

Marc Bordier par Marc Bordier /


Comme chaque année, le magazine Lire a publié dans son numéro d’été des extraits des romans de la rentrée. Par curiosité, j’en ai lu un ou deux et me suis arrêté sur Ouragan, le nouveau roman de Laurent Gaudé, à paraître le 18 août. J’ai déjà eu l’occasion d’apprécier le talent de l’auteur en lisant Eldorado, un très beau récit sur ces Africains qui tentent avec le courage du désespoir de gagner l’Europe dans l’illusion d’y trouver une vie meilleure.

Dans Ouragan, Laurent Gaudé s’intéresse une nouvelle fois au sort des déshérités, mais cette fois il s’agit des pauvres diables qui ont dû affronter le cyclone Katrina à la Nouvelle-Orléans en 2005. Les quelques pages que j’ai lues dressent le portrait des protagonistes de l’histoire: Joséphine Linc. Steelson, une négresse quasi-centenaire usée par les années, mais toujours digne dans sa pauvreté, et surtout fière de défendre son identité noire dans un Sud encore très marqué par la ségrégation; Keanu Burns, un ouvrier manutentionnaire tout juste réchappé de l’enfer aliénant de la plate-forme pétrolière sur laquelle il a travaillé durant six ans; et Rose Peckerbye, une femme paumée que le lecteur rencontre le jour du jugement de son divorce, dont elle ressort spoliée par son ex-mari. Ces trois personnages ont en commun d’être des laissés pour compte, des marginaux exploités et broyés par la machine économique et sociale. Dans la suite du récit, ils feront le choix de rester dans la ville menacée par la fureur du ciel…

Il est difficile de juger de la qualité de l’ouvrage sur ces quelques pages seulement. Cela étant, le début est prometteur. Je me souviens d’avoir été frappé à la lecture des journaux à l’époque en découvrant comment la tragédie de Katrina avait révélé au monde entier les faiblesses de la superpuissance américaine, capable de vaincre l’armée irakienne en moins de trois semaines, mais pas d’assurer à ses citoyens les plus pauvres la protection la plus élémentaire face aux aléas de la vie. Il fallait un roman pour raconter cette tragédie. Grâce à Ouragan, c’est désormais fait. J’attends avec impatience sa sortie pour voir s’il tiendra ses promesses.