Littérature contemporaine

C’est la culture qu’on assassine – Pierre Jourde

Marc Bordier par Marc Bordier /


En flânant dans une librairie à Chatou la semaine dernière, je suis tombé par hasard sur le dernier ouvrage de Pierre Jourde C’est la culture qu’on assassine. A vrai dire, il ne s’agit pas d’une nouveauté, mais plutôt d’une compilation d’articles publiés entre 2009 et 2010 sur son blog Confitures de culture hébergé sur le site du Nouvel Obs. J’aime beaucoup Pierre Jourde, et pas seulement parce qu’il présente l’originalité d’être comme moi un littéraire qui s’intéresse à la boxe française. J’apprécie avant tout ses critiques car elles ont le mérite de dédaigner le battage autour du nombril des auteurs pour s’intéresser à l’essentiel, c’est-à-dire aux textes eux-mêmes. C’est déjà ce que Pierre Jourde faisait avec brio dans La Littérature sans estomac, un très bel essai paru en 2002 et qui lui a valu quelques solides inimitiés. Il y analysait avec férocité les textes de quelques auteurs médiatiques pour en montrer toute la vacuité, tout en soulignant par ailleurs les authentiques qualités littéraires de quelques auteurs méconnus comme Chevillard, Richard, Novarina, Michon, Louis-Combet, etc. Finalement, il ne faisait qu’appliquer les méthodes de lecture qu’il enseigne en tant que professeur de littérature française (vous souvenez-vous de l’exercice du commentaire composé ?). Il exerçait son métier de critique.

Dans C’est la culture qu’on assassine, il part en guerre contre la bêtise ordinaire véhiculée par les pouvoirs économique, politique et médiatique, en s’en prend pêle-mêle à la réforme de l’université, à TF1, aux émissions de Cauet, aux journalistes serviles, à Sarkozy, à la nouvelle orthographe, etc. Vous l’aurez compris, le champ est vaste, et si la littérature est bien présente (notamment dans les parties V –Vie culturelle et VI – Livres et écrivains), elle ne constitue plus le coeur du sujet. Le style, lui, est toujours aussi jouissif : à la manière d’un Philippe Muray (mais sans doute de l’autre côté de l’échiquier politique), Pierre Jourde envoie ses coups sans retenue, avec une liberté, une intelligence et une ironie qui forcent l’admiration. Je l’avoue, je me suis délecté en lisant ces petits textes, même lorsque j’étais en désaccord avec les idées exprimées (sur la réforme de l’université notamment). Pour ceux d’entre vous qui souhaitent découvrir ces textes, ils sont pour la plupart en ligne à l’adresse http://pierre-jourde.blogs.nouvelobs.com/. Bonne lecture.