Littérature contemporaine

Un roman jeunesse qui séduira les adultes : Balto, le dernier des valets de coeur

Marc Bordier par Marc Bordier /

J’ai beaucoup lu durant ces vacances, même si j’ai été trop paresseux pour partager mes impressions sur ce blog. Parmi toutes mes lectures d’été, il en est une dont j’aimerais vous parler : Balto, le dernier des valets de cœur. Ce roman de Jean-Michel Payet m’a été recommandé par une responsable du rayon jeunesse de la librairie Arthaud à Grenoble alors que je lui demandais des conseils de lecture pour ma fille. N’ayant pas l’habitude de lire des livres destinés à la jeunesse (la mienne est depuis longtemps derrière moi, hélas…), j’étais un peu curieux en l’ouvrant. Et je n’ai pas été déçu.

 

Une enquête policière dans le Paris de 1920

Ce roman raconte une enquête policière dans le Paris de 1920 : au lendemain de la Grande guerre, Balthazar (Balto), un orphelin âgé de quatorze ans, vit avec sa mère adoptive Madame Gambette dans la Zone, cette ceinture de bidonvilles misérables qui entourait encore Paris au début du XXème siècle. Il entretient avec son (demi) grand frère Victor une relation faite de complicité et d’admiration. Mobilisé durant la guerre, ce dernier a été condamné à mort par l’armée pour rébellion, mais il a réussi à échapper au peloton d’exécution et se cache désormais pour échapper à la justice. Depuis que Victor est entré dans la clandestinité, le jeune Balto s’efforce tant bien que mal de rapporter chaque jour un peu d’argent au foyer, et les deux frères communiquent par messages furtifs sous l’œil toujours suspicieux de la police.

Un jour, Balto reçoit de son frère un courrier énigmatique lui donnant rendez-vous en secret dans le quartier des Batignolles. Une fois sur les lieux, il découvre le cadavre de Timoléon Escartefigues, un modeste réparateur de vélos assassiné d’un coup de couteau dans le dos. Surpris par une journaliste sur les lieux du crime, il est photographié et suspecté de meurtre. Désormais recherché à son tour, le jeune Balto va mener l’enquête aux côtés de la jeune journaliste qui est entretemps devenue son alliée. Ensemble, ils vont parcourir Paris en long et en large à la recherche du meurtrier. Leur enquête les mènera bientôt sur les traces des Valets de cœur, une société secrète constituée durant la guerre dans les décombres d’une maison en ruines et à laquelle appartiennent le grand-frère Victor et le malheureux Timéon Escartefigues…

 

Un roman à l’intrigue menée tambour battant

Destiné à un public jeune et à l’attention parfois volage, le roman de Jean-Michel Payet brille par sa narration à la fois très fluide et très dense. Ici, pas de temps mort, les chapitres s’enchaînent rapidement avec un art du récit parfaitement maîtrisé. A la manière du petit Poucet, l’auteur a semé sur le parcours des indices et des rencontres dont le rôle est de faire progresser l’enquête. A cet effet, le recours à l’artifice narratif de la société secrète se révèle d’une redoutable efficacité : pour parvenir à la clé finale, nos deux héros devront retrouver un à un chacun de ses membres et se plonger dans leurs plus troubles secrets. Dans ce jeu de piste, chaque révèlera un indice qui les mènera à l’étape suivante. Et pour créer un peu de tension dramatique et renforcer le sentiment d’urgence dans l’esprit du lecteur, le jeune Balto est lui-même poursuivi par des policiers très inquiétants.

 

 Un tableau de Paris au lendemain de la Grande guerre

Bien qu’il ne s’embarrasse pas de longues descriptions, le récit de Jean-Michel Payet est aussi un magnifique tableau de Paris au lendemain de la première guerre mondiale. Au cours de leur enquête, nos deux héros vont parcourir la ville de long en large, des Batignolles à Montparnasse en passant par les Champs-Elysées. A chacune de leurs courses dans Paris, ils rencontrent les visages et les types (au sens balzacien) qui forment la trame colorée de la ville. A travers ces lieux et ces rencontres, c’est donc toute la géographie sociale du Paris des années folles qui est racontée dans une langue fleurie, imagée et pleine de saveur.

En refermant ce roman, je me suis rendu compte que la littérature jeunesse recèle parfois de très belles surprises, même pour des adultes comme moi. Vivement le prochain roman de Jean-Michel Payet !

 

 

Mots clés

Balto, Jean-Michel Payet, Littérature jeunesse